Mesurer la motivation et la satisfaction du personnel est un point qui interpelle tout chef d’entreprise pour qui la confiance du personnel est importante. Cela nécessite toutefois d’avoir une ligne de conduite bien définie. Gagner la confiance du personnel et l’entretenir en permanence est une démarche délicate, car la confiance est un atout qui peut se détériorer en peu de temps. Dans cette action, l’information, la communication, la diffusion des valeurs, la pédagogie et l’écoute jouent un rôle déterminant.
Avant de vouloir mesurer la satisfaction du personnel, encore faut-il définir en quoi elle consiste. Tout comme dans une démarche d’écoute du client, avant de mesurer sa satisfaction, il faut avoir identifié quels sont les critères qui peuvent générer la satisfaction et/ou le mécontentement.
Tenir compte du contexte
Le personnel est directement lié à l’entreprise dans laquelle il travaille. Son avenir dépend en grande partie, de la capacité de celle-ci à survivre et à se développer. Si un maximum est fait pour répondre aux attentes, toutes ne peuvent être considérées pour actions, tout simplement parce toutes ne peuvent être satisfaites pour des raisons bien souvent matérielles, juridiques ou économiques.
Il est intéressant qu’une politique d’entreprise vise simultanément les trois objectifs suivants :
– Satisfaire le consommateur par la mise à sa disposition de produits et services répondant à ses attentes et besoins
– Faciliter l’épanouissement et le développement du personnel, sa sécurité et son bien-être, dans le cadre de son travail
– Permettre à l’entreprise de se pérenniser au moyen de la rentabilité économique.
Pour un chef d’entreprise, ces trois obligations ne sont pas nouvelles. Chacun de ces trois paramètres ne peut que profiter aux deux autres, et inversement une carence dans un domaine se traduirait en finalité par une détérioration de la performance sur tous les plans.
En particulier, le personnel devrait intégrer dans ses attentes le fait que sa satisfaction passe par l’obtention de résultats efficaces et efficients pour l’entreprise et le client. Il doit prendre conscience qu’il a un rôle à jouer pour permettre à l’entreprise d’atteindre ses objectifs et, in fine, satisfaire le client.
Une des conséquences de cette façon de voir est de considérer que l’on ne peut pas aborder le sujet de la satisfaction du personnel dans l’absolu : on est obligé de le restituer dans le projet d’entreprise. Le personnel évolue dans l’entreprise qui elle-même doit tenir compte des réalités de son marché.
Raison oblige
Toute démarche d’enquête envers le personnel suscite des espérances qui, mal canalisées, pourraient se traduire par une déception et une dégradation de la motivation, de l’ambiance, et de la qualité du travail effectué.
Lorsqu’on le sollicite au niveau de ses attentes, le personnel ne peut pas faire abstraction de la stratégie de l’entreprise à laquelle il appartient. Il ne peut pas faire comme si son entreprise n’était pas confrontée à une situation économique. Car tous ces paramètres liés au marché ont une incidence évidente sur la vie dans l’entreprise, mais aussi sur les évolutions possibles des carrières et conditions de travail.
La stratégie de l’entreprise se décline au travers d’objectifs, de politiques, de choix organisationnels, d’investissements et de changements qui vont affecter chaque individu dans sa vie quotidienne, et pas forcément dans le sens qu’il souhaiterait.
A ce devoir de connaissance et de compréhension de la politique de l’entreprise de la part de chaque membre du personnel, correspond réciproquement la nécessité pour les dirigeants de communiquer leur stratégie et de traduire de façon claire les contraintes de l’environnement économique. Certaines situations peuvent les amener à faire des choix de redéploiement de moyens et d’effectifs nécessaires pour la survie des emplois et de l’entreprise à moyen ou long terme.
L’impact au niveau du personnel peut se révéler simplement dérangeant (obligation de changer sa routine), déstabilisant (devoir se reconvertir dans le cadre de l’entreprise), voire traumatisant (quitter l’entreprise).
Dans le cas le plus extrême d’un licenciement d’une partie du personnel pour assurer la survie, chacun pourrait se demander en quoi il est intéressant pour le personnel d’adhérer au projet d’entreprise. Et inversement pour l’entreprise, en quoi est-il intéressant de se préoccuper de la satisfaction du personnel ? Finalement, “ y a t-il compatibilité entre les objectifs de l’entreprise et ceux du personnel ? ”
Il est important et utile de se poser cette question et de faire en sorte que les intérêts du personnel et ceux de l’entreprise se rencontrent. Cela suppose des choix de part et d’autre.
Pour tous les acteurs concernés par l’entreprise, celle-ci est un projet commun. C’est en conjuguant les efforts sur des objectifs partagés, c’est en élaborant ensemble des valeurs communes intégrant les aspirations de chaque partie que les politiques seront déployées dans un sens productif profitant à chacun.
Confiance : un double effort dans le sens de l’un, et l’autre
– L’entreprise, par l’intermédiaire de ses dirigeants, une fois son travail stratégique réalisé, a le devoir de communiquer ses choix et de les justifier. Son personnel pourra ainsi percevoir les enjeux et voir l’importance de sa collaboration. Elle doit, en outre, inclure dans ses plans d’action le coût et le temps nécessaires pour l’accompagnement de cette stratégie auprès de son personnel.
– Le personnel, informé et formé par l’entreprise, déploie tous ses efforts pour faire réussir cette stratégie. Cela suppose de sa part un degré de confiance envers la capacité des dirigeants à définir la meilleure stratégie possible. Cela suppose d’avoir confiance dans les moyens mis en œuvre pour assurer la durée des intérêts de l’entreprise et du personnel.
La condition de réussite de cette politique est une confiance réciproque entre la direction et le personnel : si une direction sait qu’elle peut compter sur son personnel, elle n’hésitera pas à se lancer dans les voies audacieuses de l’innovation et de la prise de risques, chose attendue implicitement par la clientèle. La confiance réciproque est le résultat d’une volonté, c’est quelque chose qui se construit, qui se mérite, qui n’est jamais acquise à priori.
Le danger rencontré : La rétention d’informations (du dirigeant ou du personnel) dans le but de mettre son ” adversaire ” dans l’incapacité d’agir et de comprendre le comportement de l’autre.
Pour le client cela se traduit par des prestations qui ne sont pas d’une qualité constante. Pour l’entreprise, cela débouche sur des résultats financiers négatifs. Et pour le personnel, cela contribue à créer un climat détestable où les conflits dominent et où la communication est quasi inexistante.
Une notion à prendre en compte au niveau stratégique
– “ un personnel satisfait, cela sert-il ? Et si oui, à quoi ? “
– “ que faut-il connaître du personnel pour développer une politique qui le satisfasse ? “
– “ quelles questions lui poser, quels indicateurs regarder pour apprécier le niveau de satisfaction du personnel et découvrir ses attentes ? “
Ces questions ne peuvent être posées dans l’absolu. Elles doivent être restituées dans le contexte économique de l’entreprise qui entreprend la démarche. Parmi toutes ces attentes, l’entreprise ne pourra en satisfaire qu’une partie, compatible avec les réalités économiques de son marché . Il est normal, dans ces conditions qu’elle définisse, dès le départ, le champ de ce qu’elle peut apporter à son personnel et sa marge de manœuvre. Pour pouvoir le faire en toute conscience, il est important qu’elle sache exactement quels sont les bénéfices d’un personnel satisfait.
Les bénéfices d’un personnel satisfait
Un personnel satisfait dans le cadre et l’exercice de son travail montre les comportements suivants :
– plus d’implication dans son travail (concentration, ponctualité)
– une capacité à se dépasser dans certaines circonstances (flexibilité des horaires, dépannage en cas d’urgence)
– une identification à l’entreprise (défense de son image)
– une identification à l’avenir de l’entreprise (suggestions d’amélioration, des innovations, acceptation des formations proposées, conjugaison de son plan de carrière avec les possibilités que lui offre l’entreprise)
– une loyauté envers l’entreprise (confidentialité, respect des valeurs et de la déontologie de la maison)
– plus d’écoute et de discipline envers les directives et les choix politiques de sa direction, en particulier pendant les situations de crise ou de changement
– plus de solidarité envers l’entreprise et les collègues.
– plus d’équipe, plus de coopération avec les autres unités de l’entreprise
– plus d’écoute des besoins des clients perçus comme les véritables patrons de l’entreprise.
– plus de respect dans la relation client/fournisseur en interne.
Des indicateurs de satisfaction et de motivation
– baisse de l’absentéisme, des retards ou du phénomène de présentéïsme ;
– baisse du turn-over ;
– amélioration de la compétence du personnel dans chaque poste ;
– respect des objectifs par processus ;
– service à la clientèle accru et donc fidélisation renforcée et augmentation de la part du marché ;
– continuité dans la qualité offerte à la clientèle ;
– limitation du gaspillage ;
– flexibilité à l’intérieur de l’entreprise et réactivité vis à vis de la clientèle ;
– innovation, créativité et acceptation du changement ;
– transmission du savoir-faire aux nouveaux arrivants ;
– absence de conflits sociaux et de conflits inter services ;
– diminution des cas de burn-out
Toutes ces retombées se traduisent par des gains financiers incontestables. Et au-delà des gains financiers, il y a tout le bénéfice du personnel, plus attentif aux demandes ponctuelles du client, un personnel se sentant en harmonie avec ses missions et son environnement. Il jouera davantage le rôle vis à vis de sa hiérarchie, de relais entre les attentes du marché et les réponses possibles à apporter.
Jusqu’où aller dans la satisfaction du personnel ?
Bien que tous les points vus précédemment soient intéressants, il existe des attentes auxquelles l’entreprise ne peut pas répondre, au-delà du problème de ses possibilités économiques.
La peur de l’innovation, du risque, le refus de la remise en cause. Tous ces critères qui traduisent une des attentes principales de tout personnel : la stabilité. Cela est naturel sur le fond, mais devient contestable quand cela se traduit par le refus du changement, le désir de se raccrocher à la routine, le rejet de l’innovation et du risque. Sur une telle attente, l’entreprise se doit de frustrer son personnel. Il y a des attentes même principales, capitales, auxquelles l’entreprise ne peut pas répondre sous peine de mettre en danger sa pérennité. En revanche elle ne doit pas les ignorer et rester sourde. Au contraire, elle se doit d’expliquer en quoi cette attente ne peut être satisfaite. (Au besoin faire aider la personne qui est dans cette situation de blocage.)
Elle doit expliquer, montrer la direction à suivre, vendre sa politique et accompagner son personnel dans la construction de l’avenir.
Savoir délimiter le champ de réflexion de la motivation
Avant tout travail sur la satisfaction et la motivation du personnel il faut être au clair avec la marge de manœuvre stratégique dont on dispose. L’entreprise doit orienter son analyse dans les directions où elle est capable d’apporter une réponse, ou sur les défis auxquels elle ne peut échapper. Rien n’est plus dangereux que de s’embarquer dans des études ou autres aventures, qui ne manquent pas de susciter des espérances parmi le personnel et de s’arrêter en chemin parce que l’on n’a pas les moyens d’assumer les conséquences des attentes que l’on a mis à jour.
Toute réflexion sur la satisfaction, le bien-être du personnel, et sa qualité de vie au travail, doit être menée directement en lumière avec le plan stratégique et les objectifs à atteindre.
Méthodologie :
1. Positionner l’entreprise par rapport à son environnement économique et concurrentiel
2. Définir la stratégie (par des objectifs) de l’entreprise et ses besoins pour répondre aux attentes du marché
3. Définir une politique de ressources humaines en fonction des objectifs à atteindre (profil des hommes, valeurs, maitrise des risques, accompagnement, formation…)
4. Définir les conditions de réussite de cette politique
5. Informer et communiquer la politique et les conditions de réussite auprès du personnel
6. Cadrer l’écoute du personnel selon cette politique et les objectifs à atteindre
Autrement dit : “ Donner du sens au travail “ par rapport à un cadre qui correspond au projet d’entreprise réfléchi pour assurer le développement et la pérennité de chacun.
Copyright Geneviève KREBS, 2014